So here we are

 

Bloc Party n’est pas qu’une sensation du moment, un vulgaire instantané à oublier immédiatement.
Bloc Party n’est pas prêt de s’éclipser.
Bloc Party est voué à un destin du plus glorieux, ils en ont largement le potentiel.
Bloc Party ne va pas en rester là et il n’y aura pas de Silent Alarm bis.
Car Bloc Party évoluera, d’une manière géniale.
Bloc Party sera toujours là dans dix ans.
Bloc Party est tout simplement un des meilleurs groupes du moment.

Ceci étant dit, su, et acquis, sachez que Bloc Party se produisait le samedi 14 mai au Transbordeur de Lyon, dans le cadre d’une triomphale tournée française en tête d’affiche, tournée qu’ils avaient déjà faite en première partie d’Interpol.
Ce samedi, en l’occurrence, les petits Bloc Party d’un soir s’appelait The Rakes, groupe rafraîchissant quoique peu innovant, très voir trop influencé par Gang of Four. A un tel point qu’on pouvait croire de temps à autre à du plagia. Passons.

L’ambiance monte, par palier, lentement. A mesure que les roadies installent le matériel. Le public est beaucoup moins jeune qu’on ne pouvait le craindre. Peu ou prou de petite fan de 13 ans écoutant Europe 2. Remarque, venir à Bloc Party aurait été pour elles, un véritable choc, une sorte de révélation.
Car on a rarement vu groupe aussi enjoué, conscient et heureux de la chance qu’ils ont d’être sur scène devant « 2000 crazy french people ».
Dès le titre d’ouverture de l’album et des concerts, Like Eating Glass, cette perle noire, le public ne sait si il doit rester transi devant ces nouveaux rois de la musique ou si il doit laisser le pouvoir à ses jambes qui exigent de prendre le dessus, sous peine de rompre d’horreur devant cette ligne de basse qui les appelle, qui dis-je, qui les exhorte, à se bouger.
Le dilemme n’est pas résolu. Mais Positive Tension (titre ô combien évocateur) vent le consolider encore. Un choix toujours plus cornélien n’en finit plus.
Mais Okereke, le chanteur, dans extrême bonté, vient remédier à ce faux problème en lâchant un « if you feel like going crazy, it’s about time » salvateur. Banquet. On laisse imaginer la teneur du soulagement dégagé. Les jambes, dorénavant, ne se laisseront plus dicter leurs faits et gestes, et ce jusqu’à la fin de ce concert d’anthologie.
Mais Banquet. BANQUET, ce tube interstellaire joué en troisième morceau ! Ce choix judicieux ne résume-t-il pas à lui seul tout le phénomène Bloc Party ? Les Anglais ne s’appuient pas sur un One hit wonder usé jusqu’à la moelle. Des munitions atomiques, ils en ont d’autres. Jouer Banquet si tôt prouve en effet à quel point ils en ont sous le semelle et surtout combien ils ne restent pas sur leurs acquis.
J’en suis persuadé, Bloc Party a un potentiel hors du commun.
A partir de ce point, le concert n’est plus que folie pure et orgie sonore. On enchaîne les titres tous plus destructeurs les uns que les autres. On en redemande cependant. Comme si un uppercut ne pouvait jamais nous mettre KO mais, contraire pas si paradoxal, nous régénérer un peu plus. Frappe moi encore.
Blue Light (et ses crescendos géniaux), She’s hearing voices, The Marshalls are Dead, face B que beaucoup aurait prit en titre d’ouverture de leur album – tellement le talent est grand (mais un groupe n’est il pas un groupe aux faces B encore meilleures que les titres qui leur servent de prétexte ?), Luno, les titres s’enchaînent dans un océan de sueur. Une vague impression de vivre un concert hors du commun. Et puis le chanteur lâche « the best city we’ve played in so far, and we’re not kidding ». Ah. On comprend donc.
Quand le groupe est aussi heureux que le public, cela crée une sorte d’alchimie inébranlable, alchimie qui se mute ensuite en souvenir impérissable. Dans les deux camps.
Little Thoughts. Puis Helicopter. Helicopter et ses lyrics au sujet peu commun (« Stop being so American »). Helicopter et son mini temps d’arrêt hallucinant au milieu du pré refrain. Helicopter acheva la première partie d’un concert dont même les plus grands superlatifs ne paraissent pas assez appropriés (giga méga énormissme ? Hm. Non.).

Rappel. Un vrai. Pas un retour au bout de deux minutes, comme si on en avait rien à foutre. Non. Rappel qui dure, tentative d’exaltation concluante. On pousse le public dans ses derniers retranchements. So here We are. Putain, tu m’étonnes que vous êtes là ! Non content de pondre des bombes, Bloc Party peut aussi composer des chansons aux ambiances atmosphériques jamais entendues. Bloc Party ira très loin.
The Price of gasoline permit au public de chanter. Celui-ci ne se fit pas prier. Les sourires sont vraiment des deux côtés. Est-ce la joie qui a poussé le groupe à demander quelle serait la prochaine chanson ? Tulips parait faire l’unanimité. On aurait préféré un Skeleton ou un Pulp Song (écoutez cette chanson si vous ne croyez pas à leur potentiel). En prélude à ce Tulips, un joyeux anniversaire. Tout le transbo s’y met. Joie, complicité, etc.

Deuxième rappel. On attend. Mais on n’en espérait pas tant. La réponse ? THE ANSWER ! Présente uniquement sur leur premier vinyle tiré à 500 exemplaires mais disponible en téléchargement gratuit sur le site officiel. C’est difficile à croire. La chanson n’est pas non plus sur la setlist. Ce concert est magique. Tonitruants applaudissements. Reconnaissance réciproque incommensurable. The Pioneers vient clôturer le concert d’une façon magistrale. On n’arrive pas à savoir si tout s’est vraiment déroulé de la sorte. Ca parait impossible. On a vraiment la sensation d’avoir vécu quelque chose de spécial. Mais c’est peut être là un des énièmes tours de force de Bloc Party. Faire que chaque soir mérite de rester dans les anales du rock. Putain.

PJ (05/05/05)