Instauration de la discographie commentée...
Au début, mon ambition était de faire un ALDD pharaonique avec pour chaque album les secrets, subtilités et autres anecdotes inutiles pour néophyte. Et puis ça aurait été trop long. Donc je vais essayé de me borner à dire ce que je pense de plus important.
Rappel : les écrits de ce post n'engagent bien sur que l'auteur.
The Cure ou le projet de toute une vie d'un certain Robert Smith, aujourd'hui mieux connu sous le pseudo "l'idole des jeunes musiciens pronant un revival 80's plus ou moins frais, selon qu'on s'appelle Bloc Party, The Rapture ou Interpol".
The Cure ou le groupe emblématique d'une décennie maurose, musicalement parlant(80's). Ambassadeur voir inventeur de la "new wave" pour certain. Porte étandard du mouvement gothique pour d'autres (les corbacs sont toujours aussi nombreux aujourd'hui lors des concerts du groupe).
The Cure, enfin, ou le groupe aux multiples facettes, des plus ténébreuses aux plus pop, ayant traversé un quart de siècle sans jamais faire de faux pas ou si peu...D'abord Malice (groupe interprétant exclusivement des reprises d'Hendrix) puis Easy Cure, les anglais adoptèrent leur nom définitif en 1978...
Mais suivons plutot l'évolution d'un groupe crucial à travers sa pharaonique discographie.
1979 - Three Imaginary Boys
Une pochette de l'avis générale hideuse que je trouve pourtant fantastique, de sobriété, et résumant à merveille le contenu de l'opus. A l'époque, Smith and co. ne sont encore que des gamins, ceci pouvant excuser les quelques erreurs présentes sur ce disque (l'horrible reprise de Foxy Lady) mais ceci aidant surtout à comprendre la certaine "innocence" qui règne tout au long du disque (la très drole Subway Song).
Mais quand même : quel tour de force bordel ! Car écrire des chansons de ce calibre telles 10:15 Saturday Night, Three Imaginary Boys ou encore Fire In Cairo relève tout simplement du génie. Imaginez certaines furent composer par Smith à 15 ans, preuve irréfutable d'une maturité et d'un talent extrême !
L'album est d'ailleurs assez bien accueilli par la critique qui le qualifie de disque inaugurant la nouvelle décennie. London Calling pour cloturer les 70's, TIB pour commencer, il faut avouer que c'est plutôt pas mal...
A noter que quelques moi plus tard, l'album sorti aux USA sous le nom de Boys don't Cry, titre d'une petite perle pop sortie en simple entre temps. A remarquer aussi la présence de Jumping on someone else's train qui vaut un grand détour.En résumé : un formidable premier jet (un des tous meilleurs jamais sorti à mon avis) aux chansons aussi accrocheuses qu'ingénieuses, aussi minimalistes que géniales.
1980 - Seventeen Seconds
Alors là on entre dans le vif du sujet. Certes TIB laisser présager une bonne suite (notamment la chanson titre, qui aurait très bien pu figurer ici) mais tout de même pas à ce point !
La couverture encore une fois apparait très importante dans sa symbolique : un long trip halluciné qui va, au final, durer trois ans et dont le groupe ne ressortira à jamais indemne et surtout définitivement changé...
Selon Smith, Seventeen Seconds fut à l'époque énormément inspiré par le Nick Drake de la fin, par son minimalisme et surtout par le malaise régnant au terme de son oeuvre (Pink Moon est un disque grandiose mais si l'on s'intéresse aux paroles, on se rend compte que le gus ne chante pas vraiment son amour pour la vie)...
Avec Seventeen Seconds, The Cure va se constituer une véritable base de fan, se reconnaissant clairement dans le mal être évoqué par son compositeur. Et on comprend pourquoi à l'écoute de cet album enchainant les pépites avec pour apogée, un si ce n'est le meilleur single de tous les temps : A Forest, et son intro géniale, ou le récit d'un voyage hypnothique.
Clairement, le but est de créer un ensemble homogène, un tout sombrant dans une incroyable froideur (Three). Comme si Smith voulait volontairement s'isoler du monde qui l'entoure pour s'enfermer dans un climat dépressif. On peut à ce titre tout à fait soupsonner à partir de ce point la prise crescendo des drogues les plus diverses.En résumé : un album qui marquera définitivement les esprits, se retrouvant régulièrement dans les top list. A partir de là, on commence à parler de cold wave (alors qu'avant on parlait de Pink FloydNew Wave). Au délà de tout ça, c'est surtout un formidable exercice de funambule, où Smith ne sombre pas encore totalement dans le côté obscure mais semble y être fortement attiré. La caractéristique de SS restant sans conteste son homogénéité.
1981 - Faith
De la dépression, on entre carrément dans le funèbre. Encore une fois, la pochette est très représentative (une chapelle à l'origine). Mais on se demande vraiment en quoi il faut avoir "foi" à l'écoute d'un lp aussi sombre. On en a la réponse à la fin avec un "There's nothing left but faith" d'outre tombe venant cloturer l'album.
Deuxième volume d'une trilogie désormais devenue mythique, Faith est comme la découverte par Smith d'un côté qu'il ne se connaissait pas ou qu'il se cachait n'osant pas se l'avouer et surtout l'assumer. Un coté qu'on avait clairement entrevu un an auparavant...
On enchaine donc les titres, tous plus noirs les un que les autres même si il apparaissent relativement "réconfortants" (quel paradoxe) par rapport à ce qui va suivre.
Ici encore, pas une note n'est de trop. Les rythmiques sont minimalistes, la basse prédominante. Ici encore, l'album forme un tout nous mettant mal à l'aise (Other Voices et son cri d'ouverture). Mais là où Seventeen Seconds relevait parfois un peu la tête, Faith est véritablement une descente aux enfers.En résumé : un album que l'on a souvent décrit comme transition entre SS et Pornography. Faith vaut cependant vraiment la peine qu'on s'y attarde, qu'on prenne le temps de l'écouter, de s'en imprégner.
Aucune chanson ne sort vraiment du lot (comme un A Forest auparavant), chacune est dépendante de l'autre et n'aurait aucune raison d'être sans l'autre.
Smith avait la volonté de relever la tête avec Faith (il avait par exemple tout mis en oeuvre pour que les sessions se passent de manière "joyeuse"), c'est raté. Pour notre plus grand plaisir. Ou désespoir.
1982 - Pornography
Est-ce vraiment la peine de présenter cet album ? N'importe quel amateur de musique se doit tout simplement de le posséder chez lui, fan de Cure ou pas.
Je n'ai jamais entendu d'album dégageant un tel mal être, un tel mal à l'aise, un tel sentiment de désarroi et de noirceur... SS était sombre, Faith funèbre, Pornography est carrément morbide.
Ce dernier volet de la trilogie est l'oeuvre unique d'un Smith devenu désormais paranoïaque et suicidaire. On se demande d'ailleurs comment il a réussi à rester en vie après un tel enregistrement.
Paradoxalement, le sentiment morbide du disque n'est pas repoussant, pire même il provoque l'addiction. On a besoin de réécouter les chansons encore et toujours. Des espèces de pulsions malhonnêtes nous envahissent. Car c'est là tout le génie de cet album : Smith sombre mais ils nous entraine avec lui. Son délire aurait pu paraitre égocentrique et incompréhensible, il n'en est rien : Smith arrive à nous faire partager ses angoisses à coup de "It doesn't matter if we all die" (A Hundred Years) ou encore de rythmique absolument foudroyante (The Hanging Garden)En résumé : Smith donne absolument tout. Il se vide. Il est exangue. Un album d'une noirceur inégalée. Un album malsain. Un album mythique.
Après ça, c'est la destruction ou la renaissance. La destruction était donnée largement gagnante, c'est la deuxième solution qui l'emporta, aux grands désarrois de certains (avec le recul) qui auraient aimé que Smith finisse tel un Ian Curtis. Pour la légende.
1983 - Japanese Whispers
Pornography ne fut suivi d'aucun single présent sur l'album. Japanese Whispers en est composé à moitié, l'autre étant leur face B.
Difficile d'imaginer que ces deux opus sortirent à un an d'intervalle. Chez Cure, on passe du tout au tout. De la morbidité à la jovialité exacerbé, parfois dégoulinante et presque fausse...
Cette compilation est surement le disque le moins important du groupe. On peut même spéculer sur la volonté d'un Smith avide d'argent et de succès. Mais je n'y crois pas. Les 45 tours publiés à la suite de Pornography furent une thérapie. Qu'on l'accepte ou pas.
Le contenu est écoutable mais sans plus. The Lovecats, censé parodier le jazz et être inspiré des Aristochats (rien que ça) et sa ligne de contrebasse emblèmatique est "sympa". The Walk et ses synthés malheureusement symboles d'une période musicale alors en pleine décrépitude est à chier. Entre les deux, il y a un monde, plus ou moins sympa.En résumé : un album plus que dispensable mais nécessaire à Smith pour continuer son bonhomme de chemin. Même si il renia cet album à l'époque, conscient de la médiocrité de ses compos comparé aux trois albums précédents, et qu'il préfèra se concentrer sur sa colaboration avec Siouxie and The Banshees en tant que guitariste.
A télécharger tout juste, et encore...
1984 - The Top
Arf. L'album studio du groupe que j'affectionne le moins. The Top aurait pu être bon mais à l'image de sa couverture (encore une fois), il est bien trop surchargé. Smith essaye de mettre encore plus de couleurs et de joie (l'immonde Dressing Up) mais c'est trop surfait.
Et puis l'anglais essaye de chanter autrement, ça ne marche pas.
Vraiment, c'est dommage, car les compos ne sont pas toutes mauvaises loin de là (Shake Dog Shake), elles sont tout simplement noyées dans la médiocrité et la sur-production. Je ne m'attarde donc pas.En résumé : lisez le (petit) paragraphe plus haut.
1985 - The Head on the door
Mon album pop préféré du groupe. Et aussi un de mes albums pop préféré tout court.
On pouvait légitiment commencer à douter de l'avenir du groupe et des talents de composition de Smith dans la période post-Pornography mais ce dernier nous fait taire avec brio.
Rien, absolument rien n'est à jeter dans ce petit chef d'oeuvre. Car là où les apports de nouveaux instruments et les expériences étaient un fiasco dans The Top, elles sont absolument géniales ici. On passe ainsi d'un saxo gémissant (A night like this) à des guitares espagnoles endiablés (The Blood) sans oublier les claviers aux ambiances nippones (Kyoto Song). Smith nous fait voyager, il nous transporte dans un royaume qu'il a mis du temps à trouver. Fini l'innocence et la niaiserie d'antan, Smith passe à du lourd.
Et on continue sans jamais s'arrêter, sans jamais être laisser. Les pépites s'enchainent sans se ressembler. Ecoutez Six Different Ways, vous m'en direz des nouvelles. D'apparence facile, les shémas des titres sont plus complexes qu'ils ne le laissent entrevoir. Preuve en est par le fait qu'on redécouvre sans cesse quelque chose à chaque écoute.
A partir de ce point, la Cure mania va battre son plein. Smith superstar, c'est mérité devant de telles qualités. On est au milieu des 80's et de la pop de qualité fait enfin son apparition. Pas étonnant qu'on en vende des caisses.En résumé : The Head on the door est une réussité totale. Rien n'est à laisser. Les titres n'ont pas pris une ride contrairement à un Japanese Whispers devenu obsolète un an après.
Trop souvent oublié dans le paysage pop (malgré une reprise plutot réussie de Close To me d'un -M-), cet album vaut vraiment le coup qu'on le redécouvre car il est tout bonnement génial. A posséder absolument.
1987 - Kiss Me Kiss Me Kiss Me
Premier et unique double album du groupe (ou devrais-je dire de Smith).
Robert enfonce le coup encore plus loin que l'album précédent. Sauf qu'ici, on a parfois plus l'impression d'un fourre tout que d'un album diversifié.
Mais Cure a trouvé le filon. Les chansons pop parlant d'amuuuur. In Between Days avait ouvert la voie, Just Like Heaven la perpétue.
Mais attention, qu'on ne s'y méprenne pas : Kiss Me... est tout sauf un mauvais album. C'est juste qu'il manque de cohésion.
Cependant, on trouve de véritable perle, encore une fois. Ecoutez de plus prêt How Beautiful you are, lyrics à l'appui, vous verrez que les Just Like Heaven and co. ne sont que façade.
D'autre part avec des tours de force tels The Kiss, Smith instaure les longues chansons de 6 minutes minimum, épiques, viscérales, à couteaux tranchants, désormais célèbres aux oreilles de l'amateur contemporain du groupe (Bloodflowers en est l'apogée mais on le verra plus tard).En résumé : avec cet album, c'est la concécration commerciale du groupe. C'est aussi l'apogée non pas artistique mais volontaire du côté pop de Smith. On a l'impression que, à un degré moindre que Pornography mais dans la même optique, le Robert a tout donné pour faire table rase et recommencer autre chose. C'est souvent sympa, rarement génial mais toujours écoutable. Ca vaut cependant le coup qu'on s'y attarde, notamment pour mieux comprendre l'album qui va suivre.
1989 - Disintegration
Le deuxième chef d'oeuvre du groupe au dire de Smith lui même. Comment est ce possible ? Les amateurs les croyaient morts, enfermés dans leur pop FM qu'ils vomissaient (ceux là même feraient cependant bien de se replonger dans THOTD), les traitant de traître à l'écoute d'un Just like Heaven par exemple (c'est compréhensible).
Mais non, Smith est là. Encore une fois. 7 ans après son album mythique.
Finalement Disintegration est un peu à l'amour ce que Pornography était à la mort... Car c'est peu ou prou le seul sujet de l'album. Mais attention, ce n'est pas l'amour léger des albums précédents, c'est un amour torturé, désespéré, mélancolique, triste, c'est le squelette d'un album dont la principale qualité a été d'arriver à recréer entièrement un univers et une ambiance où le noir (certes plus nuancé) fait son retour.
Mais tout de même, comment ne pas penser à Pornography ? Ca fait sept ans que Smith n'avait pas osé replonger dans ce côté qu'il avait tenté de fuire. Mais c'est un peu chasser le naturel et il revient au galop.
Mais on sent tout de même l'évolution. Disintegration est tout sauf un Pornography bis. Des chansons tels Lovesong ou Fascination Street n'ont absolument rien d'ersatz. Les nappes de synthé et la reverb sont venu remplacer le minimalisme exacerbé d'antan, sans jamais paraitre de trop comme ça a été le cas auparavant...En résumé : surement l'album le plus connu des "curés" ainsi qu'un des plus réussi. A nouveau on retombe dans la noirceur mais les racines en sont différentes. A posséder.
1992 - Wish
Surement l'album le plus méconnu du groupe et surtout le plus sous estimé. C'est un peu comme si on s'en foutait...
Mais pour l'anecdote, j'avais rencontre une fille fan transi des Cure depuis le début et dont Wish était parmis ses préférés...
On est certes loin de Disintegration , le coté pop fait son retour avec des chansons telles Friday I'm in love d'une niaiserie équivalent à Just Like Heaven mais comment passer à côté de perles telles Apart (et sa basse hallucinante et hallucinée) ou encore la magnifique From the edge of the deep green sea et son lent crescendo génial.En résumé : un album à redécouvrir pour les connaisseurs de The Cure qui ont fait l'impasse. Vous verrez, il vaut mieux que ce qu'on en dit, beaucoup mieux.
1996 - Wild Mood Swings
Ahem. Alors là encore j'ai du mal. Beaucoup de mal. Je n'ai jamais vraiment réussi à capter cet album, je le dis franchement. Pour moi il ne constitue pas grand chose sinon une tentative perdue d'avance d'atteindre des sommets apparaissant désormais comme des mirages. Smith, ou le symbole d'une grandeur perdue, pour le coup. The Cure n'est que la parodie de lui même. Les petits "cris" si étincelants jadis sont vraiment tout pourris (c'est direct).
En résumé : Non pas que cet album soit foncièrement nul (comme The Top) mais il est tout simplement fade et sans intérêt. Même ses singles atteignent des degrés de niaiseries surprenants (Mint Car).
Un espèce de glabiboulga musical que Want, le titre d'ouverture, vient sauver du fiasco.
2000 - Bloodflowers
Alors là c'est fou. Il faut quand même l'entendre pour y croire. Parce que sur le papier, je n'aurais pas donner cher de la peau de ce successeur de Wild Mood Swings (rien que ce titre peu honoriphique peut faire fuire).
Mais là, c'est tout simplement somptueux (appart la pochette, je le concède). Si ça se trouve l'album précédent n'était qu'une blague de Robert, un fantastique stratagème élaboré afin de revenir encore meilleur. Si c'est le cas, c'est plus que réussi !
Nan mais vraiment ce Bloodflowers est magistral. Je le place devant Disintegration quand aux émotions qu'il arrive à véhiculer.
Comme je le disais bien plus haut, les longues chansons épiques constituent la quasi totalité de ce joyau. Mais JAMAIS elles n'apparaissent trop longues ou redondantes. L'archétype est la chanson titre, surement ma chanson préférée du groupe. Indescriptible tout simplement. Un formidable uppercut dont on ne ressort que difficilement indemne. Et ce titre est à l'image de l'opus.En résumé : mon album préféré du groupe, plus pour des raisons sentimentales. Il n'empêche, ce n'est pas pour rien que Smith le met au même degré que Disintegration et Pornography. Un chef d'oeuvre. Mieux même, un tour de force forçant le respect éternel. Car réaliser un album de ce calibre 20 ans après, personne ne l'a réussi. PERSONNE.
2004 - The Cure
Le petit dernier. Avec le recul, c'est un album vraiment sympa et de bonne facture. Surtout la titre ouvreur, Lost, surement le meilleur dans sa catégorie (et la concurrence est extrêmement rude).
Smith ne se prend pas (moins?) la tête. Malgré des lyrics toujours sombres, on sent qu'il ne se prend pas la tête, qu'il est content d'être là, point barre. Ca se vérifie aussi lors des concerts...
Je ne m'attarde pas trop, on en a assez parlé l'année dernière.En résume : un album très bon, pas indispensable mais refermant des compositions du calibre des chefs d'oeuvre du Monsieur...
J'aurais bien aimé être en mesure de faire une transition finale sur une éventuelle suite mais je ne suis hélas pas encore en mesure de dire si suite il y aura ou pas...